sa faiblesse tout en refusant d’en reconnaître la cause. Car cette cause, elle était dans la prépondérance des privilégiés et les privilégiés allaient dominer aux États puisque des trois ordres dont se composait l’assemblée, ils en possédaient deux. Pour sortir de la crise, on faisait appel au peuple, non tel qu’il existait, mais tel qu’il avait existé deux siècles plus tôt. Le Tiers-État de 1789 si formidablement enrichi, si éclairé, si clairvoyant sur les vices du gouvernement, pouvait-il être sacrifié plus longtemps à la noblesse et au clergé ? Là où il aurait fallu une mesure radicale, on n’avait recours qu’à un expédient archaïque. Louis XVI est là tout entier, aussi faible que bien intentionné, voulant et n’osant pas, incapable de réaliser le bien qu’il souhaite et, dans sa conscience d’honnête homme timoré, espérant qu’on lui tiendra compte de ses bonnes intentions dans le moment même où il se donne les apparences de conspirer contre elles.
La transformation des États-Généraux en Assemblée nationale était fatale. Le Tiers l’exigea dès le 17 juin, et dix jours plus tard les deux autres ordres acceptèrent le fait accompli, malgré le roi, malgré la cour, malgré eux-mêmes. La Révolution était commencée.
Elle débuta par établir sur les ruines de l’Ancien Régime l’État moderne qu’appelaient à la fois de leurs vœux la bourgeoisie et le peuple. Ce que la monarchie avait timidement commencé, elle l’acheva avec une hardiesse et une ampleur qu’elle dût au sentiment de sa force. Son œuvre en ceci s’apparente à celle des souverains « éclairés » de Berlin et de Vienne. La seule différence, c’est qu’elle établit par la loi, ce qu’ils avaient établi par décrets. Joseph II ne s’y trompe point. Il se glorifie de voir son exemple si exactement suivi et ne se refuse pas le plaisir de montrer aux Belges que ses réformes, contre lesquelles ils protestent si obstinément, l’Assemblée nationale les adopte. Égalité civile, abolition des droits féodaux, réforme des codes, des tribunaux, du clergé, suppression des corporations de métier, il avait déjà voulu tout cela et son obstination avait pris les devants sur la France.
En votant les lois qui sont restées depuis lors à la base de