Page:Pirenne – Histoire de Belgique – Tome 6.djvu/86

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
66
FLEURUS

et exemptées de l’obligation de verser leurs revenus dans les caisses militaires (23 février, 21 août). Le 13 mars, on édicte des mesures contre les agents de la République qui ont « abusé de leurs pouvoirs pour satisfaire leur cupidité ou compromettre la loyauté du gouvernement[1]. »

Parallèlement à cet adoucissement du régime, s’opère peu à peu l’initiation du pays aux « bienfaits de la Révolution ». En fait de nouveautés, on ne lui avait imposé tout d’abord que les tribunaux d’exception, les assignats et le maximum. Il est temps désormais de moderniser un peuple destiné à la République. Le 16 novembre 1794, le mariage civil est institué pour « ceux qui le veulent », et le lendemain prennent place dans le droit commun de la Belgique quantité de réformes « que la philosophie appelle ». La torture, le bannissement, les galères sont rayés du texte des coutumes. Les condamnés à mort seront fusillés, à moins que les magistrats ne préfèrent « l’emploi de l’instrument des supplices usité en France »[2]. Le 1er  mars 1795, le « régime bienfaisant des jurés » est introduit, et, le 21 mars, on charge les municipalités du contrôle de la bienfaisance publique.

L’exploitation économique s’atténue. On autorise le payement des contributions moitié en assignats, moitié en numéraire ; on abolit les réquisitions non destinées aux armées, et remise est faite des amendes encourues par les contribuables en retard. Le clergé lui-même se voit traité avec moins de rigueur. On ferme les yeux sur l’application des règlements qui lui imposent la livraison des cloches et interdisent aux processions de sortir des églises. Si on n’hésite pas à l’humilier, si, par exemple, le 6 janvier 1795, ordre lui est donné de lire au prône une déclaration présentant le peuple comme la victime des hauts dignitaires ecclésiastiques, du moins n’a-t-il plus à craindre de persécution. Pourvu qu’il paye sa part dans les impôts, on ne l’inquiète pas. Le séquestre mis tout d’abord sur ses propriétés n’atteindra plus que les maisons religieuses dont la moitié des membres plus un, auront émigré.

  1. Arrêtés, p. 289.
  2. Ibid., p. 107.