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Page:Pirenne – Histoire de Belgique – Tome 7.djvu/184

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moment il se pose comme leur chef et ses discours resteront pendant trente ans la doctrine du libéralisme belge.

Les mesures qu’il fait adopter par les Chambres à partir de 1849 attestent clairement l’orientation nouvelle. Le 16 juillet de cette année, une loi autorisant le gouvernement à supprimer les droits d’exportation, est votée à l’unanimité. Une autre loi du 6 août dote le transit d’un tarif plus libéral que celui d’aucun des pays voisins. Le 22 février 1850, l’échelle mobile appliquée au commerce des grains est abolie, et le 31 décembre 1853, on décrète la libre entrée de ceux-ci. À l’intérieur même du pays, une initiative plus hardie et plus bienfaisante encore aboutit, en 1860, à la suppression des octrois.

Depuis 1844 on protestait contre l’exagération de leurs taux et, en 1845, Castiau en avait demandé la disparition. L’enquête sur le travail avait conclu dans le même sens : elle faisait observer qu’à Liège, par exemple, l’octroi prélevait au profit de la ville, le dixième des revenus des chefs de famille de la classe ouvrière. Le ministère de Theux avait appelé sur ce point, en 1846, l’attention des gouverneurs de provinces. Mais comment trouver le moyen de compenser les pertes financières que la suppression des octrois ferait supporter aux soixante-dix-huit communes qui en possédaient ? La création d’un fonds communal servant à les indemniser, permit à Frère-Orban de réaliser la réforme depuis si longtemps attendue. Elle ne débarrassait pas seulement les grandes villes de la ceinture de péages dans laquelle elles étouffaient, elle n’y diminuait pas seulement le prix des denrées, elle facilitait encore dans tout le pays les échanges et la circulation. Elle était à vrai dire une innovation digne de l’État qui, le premier sur le continent, avait eu foi dans les chemins de fer. À la rapidité des communications, elle ajoutait leur liberté complète. En la réalisant Frère-Orban rendait à l’économie nationale de la Belgique un service analogue à celui que Colbert avait rendu au XVIIe siècle à l’économie nationale de la France par la suppression des douanes intérieures.

Ce libre-échangiste était en même temps un homme d’État. La concurrence universelle des nations qu’il appelait de tous