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possible de Leuchtenberg. Ne sachant que trop qu’elle était une manœuvre des bonapartistes contre son trône, il était résolu à s’y opposer par tous les moyens. Tiraillé d’autre part, entre son désir de voir Nemours régner sur la Belgique et sa conviction qu’il n’y pourrait régner sans provoquer la guerre, la prudence le faisait pencher à lui refuser son appui.

Faute de mieux, il s’unissait aux autres Puissances pour souhaiter que la couronne de Belgique échût au prince d’Orange qui, au mois de janvier, s’abouchait avec la Conférence et le 11 lançait de Londres une proclamation aux Belges[1].

Malgré l’exclusive que le Congrès avait proclamée le 25 novembre contre sa maison, il se croyait de grandes chances de l’emporter. Non seulement il avait pour lui le consentement de l’Europe, mais un parti, sinon très nombreux, du moins très actif, travaillait depuis quelque temps en sa faveur. Les Orangistes, atterrés tout d’abord par le succès de la Révolution au point qu’aucun d’eux n’avait osé se présenter au vote des électeurs du Congrès, avaient bientôt repris courage. La crise économique que les événements avaient provoquée, leur faisait croire qu’ils pourraient l’exploiter à leur profit. Les industriels et les grands propriétaires parmi lesquels ils se recrutaient subventionnaient une propagande audacieuse. Ils se trouvaient en rapports suivis avec le roi et le gouvernement de La Haye[2]. Beaucoup d’officiers passés au service de la Bel-

  1. D’après Talleyrand, Mémoires, t. IV, p. 486, lord Grey en aurait été le véritable auteur. Palmerston fit auprès de Guillaume des démarches pour l’amener à abandonner à Orange la souveraineté de la Belgique, mais il ne put vaincre l’obstination du vieux roi, que la proclamation de son fils ne fit qu’exaspérer. Gedenkstukken, loc. cit., t. III, p. 451 et suiv. Cf. Ibid., p. 38. La proclamation était assez habile, Orange venait, disait-il, se placer devant la nation belge, et assurait l’Église de son appui, mais il insistait trop sur les Puissances et ne disait pas un mot de la constitution. Son effet fut seulement d’attirer l’attention du Congrès sur le péril orangiste et de hâter l’élection d’un roi. Le lendemain du jour où elle avait paru, le congressiste Mac Lagan était rappelé à l’ordre pour avoir proposé la candidature d’Orange. Le 7, son collègue, P. de Ryckere, qui avait jadis voté l’exclusion des Nassau, donnait sa démission, convaincu qu’il était, disait-il, que la seule solution pour sortir du gâchis était le choix du prince d’Orange. Huyttens, Discussions, t. II, pp. 147, 196.
  2. Gedenkstukken, loc. cit., t. IV, pp. 416, 419, 423. Le gouvernement de La Haye envoya 40,000 florins à un agent.