Page:Pirenne – Histoire de Belgique – Tome 7.djvu/83

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traverser pour arriver à sa régénération politique », et à voter les projets de loi qui, développant les principes posés dans la constitution, feront jouir les Belges « d’une plus grande somme de liberté qu’aucun autre peuple d’Europe ». Quant à la situation internationale, il était impossible d’en parler sans exprimer à la France la reconnaissance d’un peuple qu’elle venait de défendre. On ne peut s’empêcher pourtant de croire que Louis-Philippe n’avait pas été étranger à la rédaction un peu sybilline d’une phrase où son futur gendre émettait l’espoir que les Puissances, par leur consentement à la démolition de quelques-unes des forteresses bâties en 1815, donneraient un gage éclatant de leur juste confiance dans la loyauté du roi des Français. Peut-être ce langage n’était-il pas tout à fait celui du souverain d’un État neutre. Mais peut-être aussi était-ce une habileté que d’affirmer des sympathies qu’il ne tenait qu’à l’Europe de rendre moins exclusives.

Par leur pouvoir comme par leur composition, les deux Chambres qui débutaient dans la vie politique étaient bien différentes du Congrès. Celui-ci avait été l’organe de la souveraineté nationale : elles n’étaient que des assemblées législatives. Le pouvoir exécutif, que le Congrès avait délégué à ses comités, appartenait désormais au roi, représenté en face d’elles par ses ministres. Enfin, la division du Parlement en deux assemblées distinctes, le Sénat et la Chambre des Représentants, lui enlevait ce caractère de convention nationale qui avait été si frappant dans le Congrès.

Quant à ses membres, si deux tiers d’entre eux environ avaient déjà siégé au Congrès, ce n’était plus tout à fait des mêmes électeurs qu’ils tenaient leurs mandats. Au mois de novembre 1830, le Gouvernement provisoire avait donné le droit de vote à tous les citoyens payant un cens de 20 à 100 florins et, indépendamment du cens, aux adeptes des professions libérales dont l’exercice lui avait semblé une garantie de capacité politique. Le Congrès, cependant, que ces « capacitaires » avaient contribué à nommer, s’était défié d’eux. L’indépendance des votes ne lui avait paru assurée que par l’indépendance économique, et comme le cens seul pouvait attester cette