Page:Pirenne - Les Villes du Moyen Âge, 1927.djvu/119

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Cet état de choses comporte évidemment une infinité de nuances. Suivant les temps et suivant les lieux, l’activité commerciale et l’activité industrielle ont été plus ou moins prépondérantes parmi les populations urbaines. On sait suffisamment que dans l’Antiquité, une partie considérable des citadins se composait de propriétaires fonciers vivant soit du travail, soit du revenu des terres qu’ils possédaient à l’extérieur. Mais il n’en reste pas moins qu’à mesure que les villes s’agrandirent, les artisans et les commerçants y devinrent de plus en plus nombreux. L’économie rurale plus ancienne que l’économie urbaine continua d’exister à côté de celle-ci ; elle ne l’empêcha point de se développer.

Les villes du Moyen Âge nous présentent un spectacle très différent. Le commerce et l’industrie les ont faites ce qu’elles ont été. Elles n’ont point cessé de croître sous leur influence. À aucune époque on n’observe un contraste aussi marqué que celui qui oppose leur organisation sociale et économique à l’organisation sociale et économique des campagnes. Jamais auparavant, il n’a existé, semble-t-il, une classe d’hommes aussi spécifiquement, aussi étroitement urbaine que le fut la bourgeoisie médiévale[1].

Que l’origine des villes du Moyen Âge se rat-

  1. Il y a eu certainement plus tard au Moyen Âge quantité de localités portant le nom de ville et dotées de franchises urbaines et dont les habitants étaient cependant beaucoup plus occupés d’agriculture que de commerce ou d’industrie. Mais ce sont là des formations d’époque postérieure. Je fais allusion ici à la bourgeoisie telle qu’elle s’est constituée tout d’abord et telle qu’elle a continué d’exister dans les centres générateurs de la vie urbaine.