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CHAPITRE VI

LA FORMATION DES VILLES ET LA BOURGEOISIE

Dans aucune civilisation la vie urbaine ne s’est développée indépendamment du commerce et de l’industrie. La diversité des climats, des peuples ou des religions est aussi indifférente à ce fait que celle des époques. Il s’est imposé dans le passé aux villes de l’Égypte, de la Babylonie, de la Grèce, de l’Empire Romain ou de l’Empire Arabe comme il s’impose de nos jours à celles de l’Europe ou de l’Amérique, de l’Inde, du Japon ou de la Chine. Son universalité s’explique par la nécessité. Une agglomération urbaine, en effet, ne peut subsister que par l’importation des denrées alimentaires qu’elle tire du dehors. Mais à cette importation doit répondre d’autre part une exportation de produits fabriqués qui en constitue la contre-partie ou la contre-valeur. Il s’établit ainsi, entre la ville et son voisinage, une relation permanente de services. Le commerce et l’industrie sont indispensables au maintien de cette dépendance réciproque : sans l’importation qui assure le ravitaillement, sans l’exportation qui la compense par des objets d’échange, la ville périrait[1].

  1. Ceci n’est vrai, naturellement que pour les villes placées dans des conditions normales. L’État a dû souvent entretenir des populations urbaines beaucoup trop nombreuses pour pouvoir suffire à leur propre subsistance. Il en fut ainsi, par exemple, à Rome dès la fin de la République. Mais l’augmentation de la population à Rome était le résultat de causes politiques, non de causes économiques.