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bourgs n’étaient que des forteresses dont les murailles n’enserraient qu’un périmètre étroitement limité. Il en résulte que, dès l’origine, les marchands furent contraints de s’installer, faute de place, à l’extérieur de ce périmètre. Ils constituèrent, à côté du bourg, un bourg du dehors, c’est-à-dire un faubourg (forisburgus, suburbium). Ce faubourg est encore appelé par les textes nouveau bourg (novus burgus), par opposition au bourg féodal ou vieux bourg (vetus burgus) auquel il s’est accolé. On rencontre pour le désigner, spécialement dans les Pays-Bas et en Angleterre, un mot qui répond admirablement à sa nature : portus.

On appelle portus dans la langue administrative de l’Empire romain, non point un port de mer, mais un endroit clôturé servant d’entrepôt ou d’étape pour des marchandises[1]. L’expression a passé en se transformant à peine, aux époques mérovingienne et carolingienne[2]. Il est facile de voir que tous les endroits auxquels elle s’applique sont situés sur des cours d’eau et qu’un tonlieu y est établi.

C’étaient donc des débarcadères où s’accumulaient, en vertu du jeu de la circulation, des marchandises destinées à être transportées plus loin[3]. Entre un portus et un marché ou une foire, l’oppo-

  1. Digeste, l. 16, 59 : « Portus appellatus est conclusus locus quo importantur merces et inde exportantur ». Isidore de Séville, Etymologiae, l. XIV, c. VIII, § 39, 40 : « Portus dictus a deportandis commerciis ».
  2. Le mot y a été souvent employé comme s’il appartenait à la deuxième déclinaison. Voy. par exemple, la Vita Eparchi dans les Mon. Germ. Hist. Script. Rer. Merov., t. III, p. 557 : « Navis ipsa, omnibus portis relictis, fluctibus valde oppressa etc. »).
  3. Au xiie siècle encore, le mot conservait sa signification primitive de débarcadère. « Infra burgum Brisach et Argentinensem civitatem, nullus erit portus, qui vulgo dicitur Ladstadtt, nisi apud Brisach ». Gengler, Stadtrechtsaltertümer, p. 44.