Page:Pirenne - Les Villes du Moyen Âge, 1927.djvu/128

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chands qui vinrent s’y fixer s’installèrent au milieu ou à côté de la population préexistante. Les cités, dont les enceintes comprenaient fréquemment des espaces vides occupés par des champs et des jardins, durent leur fournir au début une place qui devint bientôt trop étroite. Il est certain que dès le xe siècle, dans beaucoup d’entre elles, ils furent forcés de s’établir en dehors des murs. À Verdun, ils construisent un enclos fortifié (negotiatorum claustrum[1]), relié à la cité par deux ponts ; à Ratisbonne, la ville des marchands (urbs mercatorum) s’élève à côté de la ville épiscopale, et le même fait est attesté à Utrecht, à Strasbourg, etc.[2]. À Cambrai, les nouveaux venus s’entourent d’une palissade de bois qui, un peu plus tard, est remplacée par une muraille en pierre[3]. Nous savons qu’à Marseille l’enceinte urbaine a dû être élargie au commencement du xie siècle[4]. Il serait facile de multiplier ces exemples. Ils établissent d’une manière irrécusable l’extension rapide prise par les vieilles cités qui, depuis l’époque romaine, n’avaient subi aucun agrandissement.

Le peuplement des bourgs est dû aux mêmes causes que celui des cités, mais il s’est opéré dans des conditions assez différentes. Ici, en effet, l’espace disponible manquait aux arrivants. Les

  1. Richer, Historiae, lib. III, § 103 (c. 985) : « Negotiatorum claustrum muro instar oppidi extructum, ab urbe quidem, Mosa interfluente sejunctun, sed pontibus duobus interstratis et annexum ».
  2. Dans le vieux droit municipal de Strasbourg, l’agglomération nouvelle s’appelle urbs exterior. F. Keutgen, Urkunden zur Städtischen Verfassungsgeschichte, p. 93 (Berlin, 1899).
  3. Gesta episcoporum Cameracensium. Mon. Germ. Hist. Script., t. VII, p. 499.
  4. F. Kiener, Verfassungsgeschichte der Provence, p. 212.