Page:Pirenne - Les Villes du Moyen Âge, 1927.djvu/170

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Il faut se garder, d’ailleurs, d’attribuer aux chartes urbaines une importance exagérée. Ni en Flandre ni dans aucune autre région de l’Europe, elles ne renferment tout l’ensemble du droit urbain[1]. Elles se bornent à en fixer les lignes principales, à en formuler quelques principes essentiels, à trancher quelques conflits particulièrement importants. La plupart du temps, elles sont le produit de circonstances spéciales et elles n’ont tenu compte que des questions qui se débattaient au moment de leur rédaction. On ne peut pas les considérer comme le résultat d’un travail systématique et d’une réflexion législative semblables à ceux dont sont nés par exemple les constitutions modernes. Si les bourgeois ont veillé sur elles à travers les siècles avec une sollicitude extraordinaire, les conservant sous triple serrure dans des coffres de fer et les entourant d’un respect quasi superstitieux, c’est qu’elles étaient le palladium de leur liberté, c’est qu’elles leur permettaient, en cas de violation, de justifier leurs révoltes, mais ce n’est point qu’elles renfermaient l’ensemble de leur droit. Elles n’étaient pour ainsi dire que l’armature de celui-ci. Tout autour de leurs stipulations existait et allait se développant sans cesse une végétation touffue de coutumes, d’usages, de privilèges non écrits mais non moins indispensables.

Cela est si vrai que bon nombre de chartes prévoient elles-mêmes et reconnaissent à l’avance le développement du droit urbain. Galbert nous rapporte que le comte de Flandre accorda en 1127 aux bourgeois de Bruges : « ut de die in diem

  1. N. P. Ottokar, Opiti po istorii franzouskich gorodov.