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Catholique est romaine. Au surplus, les éléments de sa force résident surtout dans les régions du Nord. Ses principaux collaborateurs en matière religieuse et culturelle ne sont plus, comme jadis, des Italiens, des Aquitains, des Espagnols, ce sont des Anglo-Saxons, un Saint Boniface ou un Alcuin, ou des Souabes comme Éginhard. Dans l’État, coupé désormais de la Méditerranée, les gens du Midi ne jouent plus qu’un rôle secondaire. L’influence germanique commence à y dominer dans le même moment où, bloqué vers le Sud, il s’étend largement sur l’Europe septentrionale et pousse ses frontières jusqu’à l’Elbe et aux montagnes de Bohême.

L’histoire économique fait ressortit d’une façon particulièrement frappante la divergence de la période carolingienne et des temps mérovingiens[1]. Durant ceux-ci, la Gaule constitue encore un pays maritime et c’est grâce à la mer que s’y entretiennent la circulation et le mouvement. L’Empire de Charlemagne, au contraire, est essentiellement terrien. Il ne communique plus avec l’extérieur, c’est un État clos, un État sans débouchés, vivant dans une situation d’isolement presque complet.

Sans doute, la transition ne s’est pas faite d’une époque à l’autre avec la brusquerie et la netteté d’une coupure. On observe que, depuis le milieu du viie siècle, le commerce marseillais décline à mesure que les Musulmans progressent dans la Méditerranée. La Syrie, conquise par eux en 634-636, cesse la première d’y envoyer ses bateaux et ses marchandises. Puis bientôt, l’Égypte passe à son

  1. H. Pirenne, Un contraste économique. Mérovingiens et Carolingiens (Revue belge de philologie et d’histoire, t. II, p. 223.)