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à suivre, et ils n’hésitèrent pas à s’y lancer sous l’aiguillon de l’amour du gain, aussi naturel à l’homme primitif qu’à l’homme civilisé. Le pays qu’ils occupaient mettait à leur disposition des produits particulièrement propres au trafic avec des Empires riches et de vie raffinée.

Ses immenses forêts leur fournissaient en quantité le miel, précieux à cette époque où le sucre était encore inconnu, et les fourrures, dont la somptuosité est requise, même dans les climats du midi, pour le luxe des vêtements et du mobilier. Les esclaves étaient plus faciles encore à se procurer, et grâce aux harems musulmans et aux grandes maisons ou aux ateliers byzantins, d’un placement aussi certain que rémunérateur. Ainsi, dès le ixe siècle, tandis que l’Empire Carolingien se trouvait confiné dans l’isolement depuis la fermeture de la Méditerranée, la Russie méridionale au contraire était sollicitée d’écouler ses produits vers les deux grands marchés qui exerçaient sur elle leur attraction. Le paganisme des Scandinaves du Dnieper les affranchissait des scrupules religieux qui empêchaient les chrétiens d’Occident de communiquer avec les Musulmans. N’appartenant ni à la foi du Christ, ni à celle de Mahomet, ils ne demandaient qu’à s’enrichir indifféremment avec les adeptes de l’une et de l’autre.

L’importance du trafic qu’ils entretinrent tant avec l’Empire Musulman qu’avec l’Empire Grec, nous est attestée par le nombre extraordinaire des monnaies arabes et byzantines découvertes en Russie et qui y marquent comme d’un pointillé d’or la direction des voies commerciales. De la région de Kief elles suivaient vers le Sud le cours