Page:Pirenne - Les Villes du Moyen Âge, 1927.djvu/74

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pris confiance dans l’avenir et avec la confiance, le courage et le travail. Il semble bien que l’on puisse dater du xe siècle un renouveau du mouvement ascensionnel de la population. Il est plus visible encore que les autorités sociales recommencent à s’acquitter du rôle qui leur incombe. Aussi bien dans les principautés féodales que dans les principautés épiscopales, on surprend dès lors les premières traces d’une organisation s’efforçant d’améliorer la condition du peuple. Le grand besoin de cette époque sortant à peine de l’anarchie, c’est le besoin de paix, le plus primitif et le plus essentiel de tous les besoins sociaux. Rappelons que la première paix de Dieu a été proclamée en 989. Les guerres privées, le fléau de ce temps, ont été énergiquement combattues par les comtes territoriaux de France et par les prélats de l’Église impériale d’Allemagne.

Si sombre qu’il apparaisse encore, le xe siècle a donc vu s’ébaucher le tableau que nous présente le xie. La fameuse légende des terreurs de l’an mil n’est point dénuée à cet égard, de signification symbolique. Il est faux sans doute que les hommes aient attendu la fin du monde en l’an mil ; mais le siècle qui s’ouvre à cette date se caractérise, en opposition avec celui qui le précède, par une recrudescence d’activité si marquée qu’elle pourrait passer pour le réveil d’une société longuement oppressée par un angoissant cauchemar. Dans tous les domaines, on observe le même sursaut d’énergie et je dirais volontiers d’optimisme. L’Église, ranimée par la réforme clunisienne, entreprend de se purifier des abus qui se sont glissés dans sa discipline et de secouer l’asservissement où la tiennent les