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Page:Piron - Poésies badines et facétieuses, 1800.djvu/142

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LE CHAPITRE GÉNÉRAL DES CORDELIERS.


Déjà la Renommée avait passé les mers
Pour aller annoncer à cent peuples divers,
Que l’invincible chef de la gent cordelière
Venait de terminer son illustre carrière.
Déjà, pour faire choix d’un digne successeur,
De chaque monastère, on assemble la fleur ;
Et Tolède est choisi pour tenir l’assemblée
Où doit se réunir l’élite députée.
Le Chapitre commence ; il se tient a huis-clos :
Un moine, beau par leur, l’ouvre par ce propos :
« Ô vous ! dignes soutiens de toute gueuserie,
« Vous, qui faites valoir la sainte momerie,
« Qui n’avez pour tout bien et pour tout revenu
« Que le droit casuel et du con et du cu ;
« Vous, qui de toutes parts, venez ici vous rendre,
« Au saint généralat, vous qui voulez prétendre,
« Vous vous flattez en vain, que la brigue, en ces lieux,
« Favorise jamais des vœux ambitieux.
« Quiconque ose aspirer à cette grande place,
« Ne doit, de ses talents, attendre aucune grâce.
« Plus humbles, plus savants, fussiez-vous mille fois,
« Plus ardents à gueuser que le grand saint François,
« Si vous n’avez des vits, d’une énorme mesure,
« Vous devez de ce rang vous-mêmes vous exclure.
« Le mieux muni de nous doit être général ;
« c’est là, pour notre choix, le point fondamental.
« À notre Ordre, aujourd’hui, donnons un nouveau lustre ;
« Choisissons parmi nous, le vit le plus illustre.