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Page:Piron - Poésies badines et facétieuses, 1800.djvu/33

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Traversa le ruisseau salé,
Pour venir en un pays sauvage,
Sans nulle consolation,
De zèle et de dévotion,
Faire le triste apprentissage.
Lieux escarpée il choisissait,
De mets grossiers se nourrissait.
Buvait son vin jusqu’à la lie ;
Mais, quand chez lui se présentait
Veuve accorte ou femme jolie,
Le bon ermite qu’il était,
Tout doucement l’entretenait,
Parlant d’une façon si belle,
Que tant nice et jeune fût-elle,
À son point bientôt l’amenait.
Or. ne pensez pas que ce langage
Déplut aux beautés du canton ;
Chacun du saint personnage
Voulait tirer quelque leçon :
Lui-même n’y pouvait suffire,
Bien que grâce aux heureux talents
Que le ciel donne à ses clients,
Sur cet article il fut grand sire.

Après sa mort on lui rendit
Honneurs divins sans contredit ;
Tous ces dévots brûlant le zèle
(Avec dévots j’entends ici
Nombre de dévotes aussi)
Lui bâtirent une chapelle
Sur le penchant d’un vert coteau
Lieu propre à faire la prière,