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Page:Piron - Poésies badines et facétieuses, 1800.djvu/84

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Tout son penser vise au Tirliberly.
Onc ne vit chien plus à la quête.
Vaine recherche ! elle ne trouve rien.
Dieu sait l’angoisse ! « Ô douleur sans pareille
« Là, j’ai perdu le plus beau de mon bien :
« Tirliberly !… que ma voix te réveille,
« Par-dessus l’herbe, à mes cris lève-toi.
« À mon aspect tu croissais à merveille,
« Et tu semblais avoir des yeux pour moi.
« Tirliberly !… seras-tu sans oreille ? »

À ce haut cri, dans les airs épandu,
Sort de la roche un jeune anachorète,
Frais comme rose, et qui, sous sa jaquette,
A plus et mieux que Lise n’a perdu.
« Père aidez-moi. — dit la belle éplorée,
« Vous me voyez plus que désespérée,
« Pour un bijou dans l’herbe enseveli ;
« Bijou, vraiment, qui passe le joli,
« Sans lui je meurs, sans lui rien ne m’agrée,
« Il me valait lui seul tout l’Empirée.
« Ce bijou rare a nom : Tirliberly.
« Savez que c’est, si connaissez la pompe
« De ce bas monde. Hélas ! un maladroit
« Me l’a fait perdre, et si je ne me trompe,
« Il est tombé non loin de cet endroit.
« Tenez, cherchons, nous y voici tout droit. »

Mu de pitié, le pauvre solitaire,
Tout bonnement cherche et cherche à talon,
Sans savoir quoi. Tel un visionnaire
(Mons Arouet, suzerain de Voltaire)