Page:Planck - Initiations à la physique, trad. du Plessis de Grenédan, 1941.djvu/142

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valeur absolue en vertu d’une évolution ultérieure. Est-ce là un trait qui caractérise d’une manière générale l’évolution de toute idée scientifique ? Il serait certes prématuré de l’affirmer catégoriquement.

Je me figure un adversaire de cette opinion prenant ici le contre-pied de tout ce que je viens d’écrire, et intitulant son exposé : De l’absolu au relatif. Il ne serait pas embarrassé pour trouver des faits en grande abondance à l’appui de son point de vue. Je le vois même débuter comme moi par la question des poids atomiques et dire : Le nombre qui était autrefois le poids absolu d’un atome n’est rien moins qu’une valeur absolue pour la plupart des éléments. En général nous voyons en effet que chaque élément possède plusieurs isotopes de poids atomiques différents de telle sorte que le poids atomique mesuré n’est qu’une moyenne dont la valeur reste plus ou moins fortuite, car elle dépend essentiellement du rapport des masses des isotopes dans la préparation qui a servi à la détermination du poids atomique. À supposer même que nous soyons en présence d’un isotope unique, dans l’état actuel de nos connaissances, il serait tout à fait antiscientifique d’en considérer le poids comme quelque chose d’absolu. Suivant les conceptions les plus récentes de la physique, conceptions qui s’appuient sur les expériences de destruction des noyaux atomiques, dues à Rutherford, il faut remettre en valeur la vieille hypothèse de Prout qui veut que tous les éléments soient construits avec un seul : l’hydrogène. Or dans cette hypothèse, le poids atomique perd son caractère absolu, il n’est plus qu’un simple rapport.

Ayant obtenu cet avantage apparent, mon adversaire se déciderait peut-être à jouer sa carte maîtresse : la théorie de la relativité générale. Cette seule dénomination lui suffira pour rejeter comme rétrograde et démodée toute tentative de considérer le temps et l’espace comme des absolus.

Il faudrait bien, cependant, se garder de tirer des conclusions aussi radicales de termes qui ne sont peut-être pas choisis toujours de la façon la plus heureuse, sous tous les rapports. Rappelons-nous, en effet, que la théorie de la relativité a abouti à la découverte de la valeur absolue de l’énergie. C’est être bien superficiel que de s’en tenir,