Page:Planck - Initiations à la physique, trad. du Plessis de Grenédan, 1941.djvu/280

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

veau dont il donnera la formule avant d’avoir pu le démontrer.

Cependant, il ne faut pas oublier que l’exercice de cette faculté d’intuition comporte un danger latent et des plus graves : le danger de solliciter les faits en faveur d’une idée préconçue ou même de passer sous silence ceux qui gêneraient. C’est là glisser de la vraie science à la pseudo-science qui n’est qu’une construction en l’air, destinée à s’écrouler au premier choc un peu fort.

Innombrables dans le passé, ont été les savants, jeunes et vieux, qui ont succombé victimes de leur conviction scientifique enthousiaste et, de nos jours, le péril n’a pas perdu de son importance. Pour s’en garder il n’existe qu’un moyen de protection : le respect des faits.

Plus un penseur est riche en idées, plus son imagination est féconde, plus il lui est indispensable de se pénétrer d’une chose : c’est que les faits, considérés dans le détail de leur individualité, restent toujours l’élément fondamental sans lequel il n’y aurait pas de science. C’est pourquoi, il devra s’examiner lui-même avec un soin des plus scrupuleux pour se rendre compte s’il accorde bien à ces mêmes faits tout le respect qui leur est dû.

Quand nous aurons senti solide sous nos pieds, l’unique terrain que l’expérience de la vie réelle nous a montré être sûr, alors, mais alors seulement, nous pourrons nous fier sans arrière-pensée à une conception de l’univers fondée sur la croyance à l’existence, dans cet univers, d’un ordre rationnel.