Page:Planck - Initiations à la physique, trad. du Plessis de Grenédan, 1941.djvu/33

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future comparée à la magnificence et à la richesse de couleurs de l’image passée risque de paraître bien terne et bien froide. L’ancienne image reflétait en effet la diversité des besoins humains et tous les genres de sensations spécifiques y avaient apporté leur contribution. L’image moderne au contraire a été dépouillée de tout caractère d’évidence immédiatement tangible et c’est là un grave inconvénient quand on en vient à l’épreuve de la confrontation avec la réalité. En outre, autre circonstance aggravante, il est absolument impossible de se passer complètement de sensations, car on ne saurait couper complètement toute communication avec la source indiscutable de toutes nos connaissances et il ne peut davantage être question d’une connaissance directe de l’absolu.

Quelle particularité remarquable a donc conféré à la conception de l’univers de la physique moderne une supériorité si décisive qu’elle a supplanté tous les systèmes antérieurs, malgré ses inconvénients évidents ? Si nous y réfléchissons nous ne trouvons rien d’autre que le caractère d’unité de cette conception. Cette unité fait rentrer tous les détails dans une vaste synthèse, elle s’étend à tous les lieux, elle vaut pour tous les savants, pour toutes les nations, pour toutes les civilisations.

À y regarder de prés, l’ancienne physique ressemblait davantage à une collection qu’à un portrait unique, chaque classe de phénomènes naturels y avait sa représentation à part et il n’y avait pas de solidarité véritable entre ces diverses représentations. La disparition de l’une d’entre elles n’eût pas affecté sensiblement les autres. Or ceci ne serait pas du tout possible dans le cas de la physique actuelle. Pour elle, aucun fait particulier ne peut être considéré comme négligeable, chaque détail joue son rôle bien déterminé et a son importance pour la description de la nature observable. Inversement tout phénomène observable doit trouver la place qui lui convient exactement dans l’ensemble. La description physique, nous tenons à le faire remarquer, est en cela très différente d’un portrait ordinaire qui n’a jamais la prétention de reproduire d’une manière absolument exacte tous les traits de l’original. On trouve, il est vrai, dans les traités de physique, même les plus récents, des remarques comme celle-ci : la théorie