Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, III et IV.djvu/445

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

appellent heureux celui qui n’a besoin de rien. Second argument tiré des poètes : Vivre, c’est mourir; mourir, c’est vivre. L’âme, tout en donnant la vie au corps, participe aussi, en quelque sorte, à son état de mort (ἀξωία). Le troisième, l’argument pythagoricien, est symbolique. Socrate rapporte un mythe (μυθάριον), et dit que dans cette vie nous sommes morts, et que nous avons un tombeau ; que dans l’autre vie est l’enfer (ᾅδης), et que dans l’enfer sont deux tonneaux, l’un percé, l’autre qui ne l’est pas ; que ceux qui n’ont pas été initiés et purifiés (ἀμυηθέντες καὶ ἀτελεσθέντες), puisent de l’eau dans un crible, et la versent dans le tonneau percé, souffrant ainsi des maux infinis et sans remède. En effet, comment pourraient-ils transporter l’eau dans un crible? et quand ils le pourraient, le tonneau percé ne s’emplirait pas.

Il ne faut pas s’arrêter à l’apparence, mais se demander ce qu’entend Platon, en disant que nous sommes morts ; ce que c’est que ce tombeau, ces initiés, cet enfer, ces deux tonneaux, cette eau, ce crible. — L’homme est dit mort, lorsque l’âme participe à l’état inanimé (ἀξωία) ; le tombeau que nous portons avec nous est, comme l’explique Socrate lui-même, le corps (σῆμα-σῶμα); l’enfer (ᾅδης), c’est l’obscur, parce que nous sommes dans les ténèbres,