Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, IX et X.djvu/603

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Veux-tu que nous supposions pour un moment que nous sommes nous-mêmes en état de juger et que nous avons eu commerce avec des tyrans, afin que nous ayons quelqu’un qui réponde à nos interrogations ?

Je le veux bien.

Suis-moi donc et juge. Rappelle-toi la ressemblance qui existe entre l’État et l’individu, et les considérant l’un après l’autre, dis-moi quelle doit être leur situation à tous deux.

Voyons.

Pour commencer par l’État, diras-tu d’un État soumis à un tyran, qu’il est libre ou esclave ?

Je dis qu’il est esclave autant qu’on peut l’être.

Tu vois cependant dans cet État des gens maîtres de quelque chose et libres dans leurs actions.

J’en vois, mais en très petit nombre ; et, à dire vrai, la plus grande et la plus honorable partie des citoyens est réduite à un dur et honteux esclavage.

Si donc il en est de l’individu comme de l’État, n’est-ce pas une nécessité qu’il se passe en lui les mêmes choses, que la servitude et la bassesse fassent comme le fond de son âme, et que les meilleures parties de cette ame soient précisément celles qui subissent le joug, tandis qu’une