Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, I et II.djvu/268

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ou fort petit ? et ainsi des chiens et de toutes les autres choses, comme de ce qui est vite et de ce qui est lent, de ce qui est beau et de ce qui est laid, de ce qui est blanc et de ce qui est noir. Ne t’aperçois-tu pas que dans toutes ces choses les termes extrêmes sont rares et en petit nombre, et que les choses moyennes sont très ordinaires et en grand nombre ?

Il est vrai.

[90b] Ne crois-tu pas que, si l’on proposait un combat de méchanceté, là aussi il y en aurait très peu qui pussent obtenir le prix ?

Cela est très vraisemblable.

Assurément, reprit-il ; mais ce n’est pas en cela que les raisonnemens ressemblent aux hommes ; je me suis laissé entraîner à ta suite un peu hors du sujet ; ils leur ressemblent en ce que, quand on admet un raisonnement comme vrai, sans connaître l’art de raisonner, souvent il arrive que ce même raisonnement paraît faux, tantôt l’étant, tantôt ne l’étant pas, et successivement tout différent de lui-même ; [90c] et quand on s’est accoutumé à beaucoup disputer pour et contre, tu sais qu’on finit par croire qu’on est devenu très sage, et qu’on a découvert par des lumières particulières que, ni dans les choses, ni dans les raisonnemens, il n’y a rien de vrai ni de stable, mais que tout est dans un flux et