Aller au contenu

Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, V et VI.djvu/162

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
ALCIBIADE.

Et je suis convaincu, Socrate, qu'il en serait ainsi de tout autre que moi, si la même fortune lui arrivait.

[141c] SOCRATE.

Mais tu ne voudrais pas donner ta vie pour le plaisir de commander aux Grecs et aux Barbares ?

ALCIBIADE.

Non, sans doute ; car a quoi bon ? Je ne pourraïs en jouir.

SOCRATE.

Mais si tu devais en jouir, et que cette jouissance dût t'être funeste, n'en voudrais-tu pas encore ?

ALCIBIADE.

Non, certes.

SOCRATE.

Tu vois donc bien qu'il n'est pas sûr d'accepter au hasard ce qui se présente, ni de faire soi-même des vœux, si l'on [141d] doit par là attirer sur sa tête des calamités, ou perdre même la vie : et on pourrait citer beaucoup d'ambitieux qui, ayant désiré avec passion la tyrannie, et n'ayant rien épargné pour y parvenir comme au plus grand de tous les biens, n'ont dû à cette élévation que de périr sous les embûches