Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, V et VI.djvu/178

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

avantages de ce genre, plus elle est en péril de voire de grandes fautes. Celui qui possédera toutes les sciences et tous les arts , et qui sera dénué de cette science, poussé par chacune d’elles, connue par autant de vents impétueux, ne sera-t-il pas avec raison battu par la tempête ? Et comme il n’a point de pilote, n’est-il pas impossible qu’il reste long-temps [147b] sur cette mer, sans périr ? Il me semble que c’est ici que s’applique ce que le poète dit d’un homme qu’il veut blâmer : Il savait beaucoup de choses mais il les savait toutes mal.

ALCIBIADE.

Comment le vers du poète s’applique-t-il ici, Socrate ? car, pour moi, il ne me paraît guère aller avec notre sujet.

SOCRATE.

Il y va très bien, au contraire. Mais, mon cher Alcibiade, c’est une espèce d’énigme. Telle est sa manière et celle de presque tous les autres poètes. Toute poésie est naturellement énigmatique, [147c] et il n’est pas donné à tous les hommes d’en saisir le sens ; et, outre sa nature énigmatique, si le poète est un homme avare et jaloux de la sagesse, et qui, au lieu de nous la découvrir, ne cherche qu’à la cacher, alors il est presque impossible de pénétrer sa pen-