Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, V et VI.djvu/489

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vient fuyard. Le jeune homme trompé poursuit alors son ancien amant de son indignation et de ses imprécations, cruellement puni d’avoir ignoré dès le commencement qu’au lieu d’accorder ses faveurs à un homme amoureux et nécessairement fou, [241c] il ferait mieux de les réserver à un ami sage et maître de lui-même ; qu’autrement il lui faudrait s’abandonner à un infidèle, à un capricieux, à un jaloux, dont la compagnie lui serait à la fois déplaisante et nuisible ; nuisible à sa fortune, nuisible à sa santé, mais surtout nuisible à son instruction, la chose du monde qui est et sera dans tous les temps la plus importante et la plus précieuse au jugement des dieux et des hommes. Voilà, mon cher enfant, ce qu’il faut sans cesse avoir présent à l’esprit ; sache bien que la tendresse d’un amant n’est jamais une affection bienveillante, mais un appétit grossier qui cherche à se satisfaire :

L’amant aime son bien-aimé, [241d] comme le loup aime l’agneau[1].

  1. C’est un vers de Platon. Hermias y voit, à tort ou à raison, une parodie de deux vers de l’Iliade, XXII, 261.