Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, V et VI.djvu/516

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On est libre d’admettre ou de rejeter l’autorité de ces vers, mais il n’en est pas moins vrai que les amants éprouvent l’espèce de sentiment que j’ai tâché de décrire.

Si l’homme épris d’amour fut autrefois un de ceux qui composaient le cortège de Jupiter, le dieu qui tire son nom de ses ailes est pour lui un fardeau moins incommode, il le supporte avec plus de constance. Mais ceux qui, attachés à la suite de Mars, l’ont suivi autour du ciel, une fois pris par l’amour, s’irritent à la seule idée d’une injure de la part de celui qu’ils aiment, et une rage sanguinaire les porte à s’immoler, eux et le jeune homme qu’ils chérissent. [252d] Ainsi le dieu dont on suivait le cortège, on l’honore dans cette vie ; on s’efforce de l’imiter, tant qu’on n’a pas été corrompu ; et l’on conserve pendant la première génération les mêmes mœurs, la même manière de vivre et d’agir, soit envers ceux qu’on aime, soit envers les autres hommes. Chacun se choisit un amour analogue à son caractère, fait de cet amour son dieu, et se plaît à le former et à l’orner comme une statue, pour [252e] l’adorer et célébrer ses mystères. Ceux qui ont suivi Jupiter veulent trouver une âme de Jupiter dans celui qu’ils aiment. Ils examinent donc s’il a naturellement le goût