Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, V et VI.djvu/623

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chose dans quelque autre ville, on te punirait bien vite du dernier supplice comme un enchanteur.

SOCRATE.

Tu es un rusé, Menon, et tu as pensé m’attraper.

MENON.

En quoi donc, Socrate ?

[80c] SOCRATE.

Je vois bien pourquoi tu m’as comparé.

MENON.

Pourquoi, je te prie ?

SOCRATE.

Afin que je te compare à mon tour. Je sais que tous ceux qui sont beaux aiment qu’on les compare : cela tourne à leur avantage ; car les images des belles choses sont belles, ce me semble. Mais je ne te rendrai pas comparaison pour comparaison. Quant à moi, si la torpille étant elle-même engourdie jette les autres dans l’engourdissement, je lui ressemble ; sinon, je ne lui ressemble pas ; car si je fais naître des doutes dans l’esprit des autres, ce n’est pas que j’en sache plus qu’eux : je doute au contraire plus que personne, et c’est ainsi que je fais douter [80d] les autres. Maintenant, quant à la vertu, je ne sais point du tout ce que c’est : pour toi, peut-être le