Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, XI, XII et XIII.djvu/381

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visées, comme aujourd’hui, par régions, entre des dieux qui les gouvernaient ; les animaux mêmes étaient tombés en partage, par genres et par troupes, à des démons qui leur servaient comme de divins pasteurs, et dont chacun suffisait à tous les besoins de son troupeau ; en sorte qu’il n’y avait point d’animaux qui fussent féroces, qu’ils ne se dévoraient point entre eux, et qu’on ne voyait ni guerre ni querelle d’aucune espèce : enfin, tous les biens qui naissaient d’un si bel état de choses seraient infinis à redire. Quant à ce qu’on raconte de la vie des hommes pour qui tout naissait de soi-même, voici quelle en est la cause. Dieu lui-même, placé à la tête de l’humanité, la conduisait, comme aujourd’hui l’homme, en qualité d’animal de nature différente et plus divine, conduit les races inférieures. Or, sous ce gouvernement, il n’y avait ni cité, ni mariage, ni famille ; les hommes ressuscitaient du sein de la terre, sans se rappeler rien de ce qui avait précédé ; toutes ces choses leur étaient étrangères. Ils recueillaient sur les chênes et sur beaucoup d’autres arbres des fruits abondants, que la culture n’avait pas fait naître et que la terre donnait d’elle-même. Ils vivaient la plupart du temps nus, errants et sans abris : car la température modérée des saisons ne pouvait les faire souffrir, et ils trouvaient un lit moelleux