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NOTICE

usage, pareillement intempérant, de la dialectique : Timon le Sceptique en effet, dans ses Silles (fr. 28 Diels) le rapprochait d’Euclide, l’un bavard[1], l’autre, disputeur. On sait en outre quelle parenté unit l’école d’Érétrie, fondée par Ménédème et Asclépiade de Phlionte, d’une part à l’école d’Élis, de l’autre, à celle de Mégare[2]. Des cinq Compositions socratiques (λόγοι σωκρατικοί) qui lui étaient attribuées, deux seulement étaient tenues pour authentiques : son Zopyre, dont le thème physiognomique est passé dans la légende de Socrate, et son Simon, duquel sort sans doute ce prétendu disciple de Socrate, Simon le cordonnier, dont les propos (σκυτικοὶ λόγοι) étaient, à la vérité, également rapportés à Eschine. Aulu-Gelle parle de l’élégance maniérée du style de Phédon : le pauvre fragment conservé par Sénèque (Ep. 94, 41) semble bien lui donner raison. En somme, autour de la personnalité de Phédon il n’y a pour nous qu’incertitudes et ténèbres.

Passons au dialogue raconté. Le théâtre en est la prison où, sur l’ordre des Magistrats, le condamné doit avoir, au coucher du soleil[3], mis fin lui-même à son existence en buvant la ciguë. Parmi les personnages nommés comme présents, cinq seulement prennent part à l’entretien : Criton, Phédon, Simmias, Cébès, enfin celui que Phédon ne peut désigner nommément avec certitude (103). D’autres interventions sont antérieures à l’entretien, ou seulement épisodiques : celles du Portier, de Xanthippe ou du Serviteur des Onze et de son acolyte. Platon y a joint une liste d’ab-

  1. Phlédon, disait-il, en faisant un calembour sur le nom.
  2. Avant de connaître Stilpon de Mégare, Ménédème (mort à 74 ans, peu après 278) avait été l’élève à Élis de Moschus et d’Anchipylus, successeurs de Phédon après Plistanus. Raison de plus pour ne pas éloigner beaucoup de la mort de Socrate la fondation de l’école d’Élis, à supposer même qu’elle ne fût pas antérieure. Enfin, si c’est vraiment une règle pour Platon (comme l’a indiqué M. L. Parmentier dans ses conférences de 1925 à la Sorbonne) de ne pas mettre en scène des hommes encore vivants, il est possible que Phédon fût déjà mort au moment de la composition du dialogue.
  3. Voir p. 8, n. 1 et p. 100, n. 3. — Il est assez difficile de préciser à quelle époque de l’année eut lieu la mort de Socrate : dans le Phédon il est question à la fois de la fête d’Apollon (61 a) et du pèlerinage à Dèlos (58 a-c). Or celui-ci avait lieu en février ou mars, tandis que la fête du Dieu se plaçait au début de mai ; en parlant de la fête, Platon a sans doute en vue les fêtes de Dèlos.