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NOTICE

conservateurs, assez proches de cette aristocratie modérée dont Théramène avait été, dans le gouvernement des Trente, le représentant malheureux. On attaqua donc le décret de Thrasybule : il était illégal, n’ayant pas reçu l’approbation préalable du Conseil (la Boulê). Le décret fut cassé[1], et Lysias dut rester dans l’isotélie. Déçu dans ses espérances, il n’abandonne pas son lucratif métier d’avocat, mais il s’occupe surtout de causes politiques ; il plaide même en personne, dans cette année 403 qui avait failli voir son triomphe, contre Ératosthène, qui avait fait périr son frère. Or, ce serait justement à partir de 403 que Lysias aurait cherché à se faire une réputation d’homme de lettres et de professeur de composition littéraire. À cette période appartient en effet son Discours Olympique, prononcé en 388[2] et c’est ainsi que, par l’éloquence d’apparat, il se serait consolé de n’avoir pu devenir un orateur politique. Il y jetait feu et flamme contre les tyrans, engageant les Grecs à se réconcilier contre eux ; non plus, il est vrai, contre l’ennemi héréditaire, contre la Perse, mais bien contre une puissance redoutable du pays d’où il était originaire, contre Denys, le prince syracusain qu’une ambassade somptueuse représentait précisément à la Fête. À la détresse des Grecs il opposait les immenses richesses dont ils avaient sous les yeux le témoignage insolent. Bref, son éloquence échauffa si bien les esprits que, à la suite de manifestations hostiles, l’ambassade se retira. Lysias provoquait ainsi un incident qui devait être fatal à la renaissance athénienne. La colère poussa en effet Denys à appuyer énergiquement l’hostilité de Sparte et de la Perse, et la dureté des conditions imposées par la paix d’Antalcidas (387) en fut probablement encore aggravée. C’est de la même époque que seraient aussi l’Apologie de Socrate, qui vraisemblablement répondait au pamphlet de Polycrate (Banquet, Notice, p. x, sq.), et enfin, comme si avec l’âge les sujets proprement sophistiques tentaient davantage un Lysias apaisé, ces discours ou lettres Sur l’Amour dont le Phèdre nous aurait

  1. Comparer dans le Phèdre le passage de 258 b et Notice, p. xxxv, n. 1. — Sur les faits, voir Paul Cloché, La restauration démocratique à Athènes en 403 (1915).
  2. Celui de Gorgias est de 392, à la Fête précédente.