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MÉNEXÈNE

ristiques pour qu’on soit en droit de conclure que Platon a eu sous les yeux le texte de Thucydide[1]. Mais le contenu des deux œuvres est fort différent[2]. Tout l’exposé historique qui, dans le Ménexène, forme la plus grande partie de l’éloge, est absent de Thucydide. Après quelques mots sur la valeur des ancêtres, Périclès annonce qu’il laisse de côté ce sujet connu, pour s’arrêter longuement sur les institutions et les mœurs d’Athènes (Thuc., II, 36) : or, sauf l’endroit relatif à la constitution athénienne, où Platon semble commenter ironiquement Thucydide, rien ne répond, dans le Ménexène, à ce développement sur le caractère athénien. Au reste, Socrate le faisait prévoir, en donnant son discours comme un assemblage de tous les morceaux de rebut qui n’avaient pas trouvé place dans celui de Périclès[3]. Quant à la forme, le Ménexène n’offre avec Thucydide d’autre analogie que l’emploi de certains σχήματα devenus de règle dans l’éloquence d’apparat.

D’autres ont pensé que Platon imitait surtout l’oraison funèbre attribuée à Lysias[4]. Elle est intitulée Pour les soldats qui allèrent au secours de Corinthe, et les derniers éditeurs[5] en placent la date en 392 ou 386. Son objet la met donc en rapport étroit avec le Ménexène. Nombreuses, d’autre part, sont les ressemblances que présentent les deux discours, pour le fond[6] comme pour la forme[7]. S’il était vrai que le Ménexène s’inspirât de Lysias et fût dirigé contre lui, on voit les conclu-

    Ménex., 236 d et Thucydide, II, 35 ; Ménex., 238 c, et Thucydide, II, 37, 1.

  1. Berndt, o. l., p. 4.
  2. id.
  3. Berndt, o. l., p. 5.
  4. Stallbaum, o. l., p. 10.
  5. L. Gernet et M. Bizos, Lysias, Discours, tome I, p. 43 (Collection des Universités de France).
  6. L’orateur déclare que son sujet n’a pas encore été épuisé par la poésie ni par l’éloquence (2), cf. Ménex., 239 c ; il rappelle les victoires remportées sur les Amazones, les Thébains, et sur les Argiens pour la défense des Héraclides (4-16), cf. Ménex., 239 b ; il glorifie les exploits des guerres médiques, Salamine et Platées (20-27), cf. Ménex., 239 c sq.) ; il célèbre l’hégémonie bienfaisante d’Athènes (54), etc. Comparer encore 48 et Ménex., 242 a.
  7. Comparer 47 et Ménex., 241 d ; 48 et Ménex., 242 a ; 55, 61 et Ménex., 243 c.