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MÉNEXÈNE

Le Lysis le représente comme un grand disputeur (ἐριστικός, 211 b). Il se montre ici sous un jour différent. Socrate lui demande s’il s’imagine être parvenu au terme de l’éducation (παίδευσις) et à celui de la haute culture (φιλοσοφία) qui, pour les jeunes Athéniens de famille riche, faisait suite à l’éducation proprement dite. Cette question moqueuse est une allusion à l’état d’esprit de ceux qui, comme le Calliclès du Gorgias (484 c sq.), voyaient dans la philosophie un divertissement bon pour la jeunesse, mais indigne de l’âge mûr, et jugeaient nécessaire, quand ils étaient devenus des hommes, de l’abandonner pour l’action politique[1]. Ménexène répond avec respect qu’il a l’ambition d’exercer des charges dans la cité, mais qu’il se réglera sur les conseils de son maître. Il est clair, cependant, qu’il partage l’engouement général pour les discours funèbres. L’improvisation, en pareille matière, lui paraît exiger des dons exceptionnels. Aussi semble-t-il choqué des plaisanteries que Socrate dirige contre les orateurs. Il doute que son maître soit capable de ce qu’il regarde comme un tour de force. Il est impatient d’ouïr le discours qu’on lui annonce ; à la fin, il ne cache pas son admiration pour le morceau d’éloquence qu’il vient d’entendre, et il prie Socrate de lui en rapporter d’autres.


La fête des Épitaphia.

Le Ménexène se présente donc sous la forme d’un dialogue encadrant un long discours, un épitaphios logos, prononcé par Socrate. L’usage de ces oraisons funèbres était ancien à Athènes[2]. Les dépouilles des soldats morts recevaient une sépulture commune dans le cimetière du Céramique[3]. Chaque année, les funérailles étaient célébrées dans une cérémonie publique (Épitaphia)[4], qui, après la construction du Théseion, fut rattachée aux fêtes consacrées à la légende de Thésée et au culte des bienfaiteurs de l’État. Du 5 au 7 pyanepsion

  1. Cf. Wendland, Die Tendenz des Platonischen Menexenus (Hermes, 1890, p. 171) ; H. Raeder, Platons philosophische Entwickelung, p. 126.
  2. La loi qui l’institua remontait peut-être à la première guerre médique.
  3. Même avant les guerres médiques, suivant Pausanias (I, 29, 5).
  4. Instituée ou réorganisée par Solon (Diogène de Laërte, Sol., 8).