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MÉNEXÈNE

composition, en faisant voir que le discours doit ressembler à un organisme vivant, où les diverses parties sont proportionnées entre elles et avec l’ensemble (264 bc). Mais, en reprenant l’Éroticos de Lysias, il veut d’ailleurs montrer qu’aux yeux du philosophe cet essai pèche par la base, faute d’une définition préalable de l’objet à traiter[1], et c’est à établir cette définition qu’il s’applique. Le cas est différent dans le Ménexène, où l’auteur ne se préoccupe que de distinguer les points à développer, sans aucun souci de donner une définition philosophique, et, loin de fuir les redites, blâmées par Socrate chez Lysias, paraît au contraire les rechercher.

Il est plus légitime, croyons-nous, de relever ce qu’a de laborieux[2] — tranchons le mot : de pédantesque — une disposition annoncée et poursuivie jusqu’au bout avec une infatigable insistance. Ces distinctions complaisamment établies, et reprises sans fin, sentent la manière de l’école et les procédés de la rhétorique. Beaucoup plus qu’au premier discours de Socrate dans le Phèdre, elles font songer au discours d’Agathon dans le Banquet[3]. Ici et là, c’est la même méthode de division et de subdivision appliquée avec une fastidieuse monotonie[4], les mêmes reprises des points déjà traités avant

  1. Phèdre, 287 c sq.
  2. Wendland, o. l., p. 83.
  3. Dès le début, Agathon indique les deux points à traiter (194 e) : I. Manière dont il faut louer l’Amour ; II. Éloge de l’Amour. — I. Pour le louer, il convient de montrer sa nature, puis ses bienfaits. A. Nature de l’amour : il est le plus heureux, parce qu’il est le plus beau et le meilleur, a. Il est le plus beau : 1o comme étant le plus jeune : preuves : il fuit la vieillesse et recherche la jeunesse ; 2o étant jeune, il est aussi délicat ; preuve : il établit son séjour dans les âmes douces ; 3o en outre, il est souple ; preuve : sa grâce. b. Il est le meilleur ; en effet : 1o il est juste ; preuve : on se met volontairement à son service ; 2o tempérant ; preuve : l’amour est supérieur aux plaisirs ; 3o habile ; preuve : il rend poète qui lui plaît, etc. Conclusion : étant le plus beau et le meilleur, il ne peut manquer de procurer aux autres les mêmes avantages. En effet, il nous inspire la sociabilité, nous enseigne la douceur, etc. — Cf. Wendland, o. l., p. 183.
  4. 194 e, πρῶτον μὲν… ἔπειτα ; 195 a πρῶτον… ἔπειτα ; 195 a πρῶτον… ; 196 d καὶ πρῶτα μὲν… ; 195 a φημὶ οὖν…, 195 b ἀλλὰ φημὶ…