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Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome VI.djvu/97

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INTRODUCTION

suscités les luttes politiques à l’intérieur d’Athènes vers la fin du ve siècle, nous n’avons conservé que celui du « vieil oligarque » contre la démocratie. Critias, à qui on l’a souvent attribué, est l’auteur d’une série d’études probablement plus objectives sur les constitutions de la Thessalie, d’Athènes et de Lacédémone. Les révolutions qui se succédèrent de 411 à 403 firent fleurir non seulement les pamphlets politiques, mais aussi une série de constitutions plus ou moins éphémères, de projets de constitutions, ou même de pseudo-constitutions inventées pour soutenir tel ou tel essai de réforme. Aristote lui-même s’y est laissé tromper. Lorsqu’on voit enfin ce dernier rassembler et commenter cent cinquante-huit constitutions, on comprend quelle riche matière Platon dut avoir comme substruction de la synthèse qu’il nous livre ici[1].

Cette matière, il ne la traite ni en pamphlétaire ni en pur historien, encore moins en collectionneur. Ici comme toujours, son but est d’un réformateur et sa méthode d’un philosophe, c’est-à-dire d’un synoptique. Nous savons quel idéal éclaire et guide sa philosophie de l’histoire : partant de la constitution où se réalise la justice totale, il nous montre par quelle série logique de déchéances s’établit, avec le tyran, le règne de l’injustice intégrale. D’une constitution à l’autre, il suit toujours le même schème, nettement dessiné : genèse et mœurs de la constitution, genèse et mœurs de l’individu qui lui correspond. Mais, comme la tyrannie balance en importance à ses yeux les trois autres constitutions, elle prend aussi, dans son exposé, sensiblement autant de place que ces trois autres ensemble. D’autre part, le tyran n’est étudié si attentivement que pour être comparé au roi philosophe. L’exposé général se divise donc en trois parties bien équi-

  1. Voir le texte de [Xén.] Ἀθηναίων πολιτεία dans Xén., Scripta minora, II, Rühl, Leipzig, 1919, p. 29-48. Pour les pamphlets politiques, cf. Aristote, Constitution d’Athènes, Mathieu-Haussoullier, Paris, 1922, p. v et suiv. Aristote en utilise au moins trois : l’un, de tendances démocratiques ; un autre, violemment oligarchique, écrit par un ami de Critias ou peut-être par Critias au début de 403 ; le troisième, d’un oligarque modéré, favorable à Théramène. Sur les constitutions, et spécialement la constitution dite de Dracon qu’Ar. utilise au chap. iv (falsification née peut-être vers 409), cf. ib., p. vii/ix. Sur les 158 Constitutions d’Ar. cf. Diog. La., V, 27.