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LA RÉPUBLIQUE VII

Qu’on la cultive pour connaître ce qui est toujours, et non ce qui à un moment donné naît et périt.

Je n’ai pas de peine à en convenir, dit-il ; car la géométrie est la connaissance de ce qui est toujours.

Elle est donc, mon brave ami, propre à tirer l’âme vers la vérité et à faire naître l’esprit philosophique, qui élève nos regards vers les choses d’en haut, au lieu de les tourner, comme nous faisons, vers les choses d’ici-bas.

Elle y est particulièrement propre, dit-il.

cNous mettrons donc toutes nos instances, repris-je, à recommander aux citoyens de notre belle république de ne point négliger la géométrie ; elle a d’ailleurs des avantages accessoires qui ne sont pas à dédaigner.

Lesquels ? demanda-t-il.

Ce sont précisément ceux que tu as reconnus toi-même, répondis-je, et qui regardent la guerre ; de plus elle aide à mieux comprendre les autres sciences, et nous savons qu’à cet égard il y a une différence du tout au tout entre celui qui a étudié la géométrie et celui qui l’ignore[1].

Du tout au tout, c’est vrai, par Zeus, fit-il.

Voilà donc la seconde science que nous prescrirons à la jeunesse.

Prescrivons-la, dit-il.


L’astronomie.

XdEt maintenant, donnerons-nous à l’astronomie le troisième rang ? N’est-ce pas ton avis ?

Si, dit-il ; car si le laboureur et le nautonnier doivent être particulièrement prompts à reconnaître à quel moment du mois et de l’année ils se trouvent, le général d’armée doit l’être tout autant.

Tu m’amuses, dis-je ; on dirait que tu as peur que le vulgaire ne te reproche de prescrire des études inutiles. Or les sciences que nous choisissons ont une utilité qui n’est pas négligeable, bien qu’elle soit difficile à concevoir, c’est qu’elles

  1. Platon attachait une telle importance à la géométrie et aux sciences qui lui sont apparentées qu’il avait fait inscrire à l’entrée de son école : « Que nul n’entre ici, s’il n’est géomètre. » Philoponos, Comment. in Aristot. p. 117, 26 et Tzetzes, Chil. VIII 973. Sur la tradition qui fait de l’école de Platon le centre des études mathématiques au ive siècle, voir Introd. p. lxxix.