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NOTICES

valeur à qui l’on confiait le salut du pays, ou que ceux-ci se faisaient attribuer[1]. C’était une manière de dictature militaire. Diodore, il est vrai, mentionne dans ce texte uniquement Denys et ne parle pas d’Hipparinos. Il nomme, du reste, très rarement ce dernier dans son ouvrage, peut-être une seule fois et pour signaler son grand crédit auprès des Syracusains (XVI, 6). Plutarque est plus explicite et relate au chapitre 3 de sa biographie de Dion la parité du pouvoir accordé à Denys et à Hipparinos : … Ἱππαρίνου, πρωτεύσαντος ἀνδρὸς Συρακοσίων καὶ Διονυσίῳ συνάρξαντος, ὅτε πρῶτον αὐτοκράτωρ ἐπὶ τὸν πόλεμον ᾑρέθη στρατηγός. Aristote déjà, dans un passage de la Politique (Ε 1306 a), expliquant la transformation de l’oligarchie en tyrannie, prétend qu’elle provient des chefs eux-mêmes qui aspirent pour eux à ce nouveau régime ou favorisent un prétendant, « comme fit Hipparinos à l’égard de Denys ». Ce témoignage suppose qu’Hipparinos était regardé comme un chef, tout de même que Denys.

Le texte de la 8e lettre fait évidemment allusion à cette sorte d’acclamation populaire dont parlent Diodore et Plutarque. Dès lors, serait-il téméraire de penser que l’auteur n’avait pas écrit le mot τυράννους, mais bien στρατηγούς ? Un scribe pressé, peu au courant des événements historiques, trompé par l’abréviation du mot et s’arrêtant à l’idée suggérée par le terme αὐτοκράτωρ, aura lu τυράννους qui a passé dans nos manuscrits. Cette conjecture nous paraît au moins assez probable.


B. L’institution des éphores (354 b). — On veut voir une divergence entre ce texte et celui des Lois, III, 692 a. La lettre attribue à Lycurgue l’institution du sénat et des éphores. Les Lois distinguent trois « sauveurs de l’État » : un dieu, un homme divin (sans doute, Lycurgue) qui créa le sénat, enfin un « troisième sauveur » (peut-être Théopompe) qui tempéra encore l’absolutisme royal par la puissance des éphores.

Il serait surprenant qu’un plagiaire, si fidèle par ailleurs à reproduire les idées et parfois jusqu’aux expressions des Lois,

  1. Archytas fut également choisi par ses concitoyens comme στρατηγὸς αὐτοκράτωρ à Tarente. Cf. Diels, Die Fragmente der Vorsok.², I, p. 251, 5.