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LETTRE II

sujet d’une opinion que Platon présentait comme une hypothèse et qu’Aristote discutera[1].

Ritter a démontré la parenté linguistique des lettres II et XIII[2]. Parenté du vocabulaire, ressemblance des formules de transition, usage identique de certaines tournures, même façon de combiner les particules, — tout cela est incontestable, et, malgré la différence des thèmes, on rapproche volontiers les deux lettres. Ces indices ne permettent pourtant pas de conclure avec certitude à l’identité des auteurs, car les deux textes sont trop courts pour offrir aux recherches stylistiques des matériaux suffisants. Pourtant, si l’on corrobore ces indications par le contenu des lettres, qui nous révèle un Platon assez semblable dans les deux écrits et très différent de celui des Dialogues ou de la 7e lettre, un Platon guindé, pédant, tantôt d’une excessive familiarité avec le tyran, prêt à lui dénoncer tous ceux qui parlent mal de lui (315 a ; XIII, 362 b, c, e), d’autres fois plein d’une suffisance ridicule, — le rapprochement devient de plus en plus significatif. Enfin, comme dans la 13e lettre nous avons cru deviner des traces de pythagorisme, ici, la doctrine, la méthode, le vocabulaire nous transportent en plein milieu pythagoricien. Qu’il suffise de rappeler la formule des trois principes que nous avons étudiée plus haut, l’insistance à recommander le secret[3], l’invitation à meubler sa mémoire au lieu d’écrire, procédé cher à l’école de Pythagore suivant le témoignage d’Aristoxène[4], l’emploi du terme ἀκούσματα, pour désigner une science (314 a)…

L’ensemble de ces raisons s’oppose sérieusement à la thèse de l’authenticité. Cet écrit, comme la 13e lettre et quelques autres dont nous parlerons plus loin, paraît dériver d’un groupe platonicien où l’on se plaît à faire ressortir dans la

  1. Éthique à Nicomaque, Α, 11, 1101 a, 30 et suiv. — Voir aussi de Platon l’Apologie de Socrate, 40 c et suiv. Il ressort de ces passages que la question était fort discutée dans les écoles.
  2. Neue Untersuchungen, pp. 364, 365.
  3. On trouve encore cette recommandation du secret dans d’autres correspondances apocryphes. Voir par exemple la 6e lettre d’Aristote adressée à Alexandre, Hercher, p. 174. C’est la réponse à la 1re lettre d’Alexandre, Hercher, p. 98.
  4. Diels, Die Fragmente der Vorsokratiker², I, 282, 16 ; 284, 32.