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NOTICE

l’impiété. Toutes ces révélations proviennent de tablettes d’airain apportées à Délos par les Hyperboréens. Le narrateur décrit le séjour divin des âmes vertueuses et la région où les criminels expient dans des supplices une existence de crimes.

Sans doute, la plupart de ces traits font songer aux mythes eschatologiques du Gorgias, du Phédon, du Xe livre de la République. Ces derniers reproduisaient également des traditions orphico-pythagoriciennes[1]. On serait donc porté à croire de prime abord que l’auteur de l’Axiochos a simplement imité Platon. Cependant, en se rappelant la vogue de la littérature mystico-symbolique vers la fin de l’ère ancienne, la faveur que rencontra dans presque tous les milieux le pythagorisme renaissant, on ne s’étonnera pas de trouver un récit de ce genre chez un auteur qui se rattache par tant d’autres traits au mouvement philosophique de cette époque. D’autre part, dans le tableau des Enfers, un certain nombre d’éléments semblent bien déceler une période tardive : par exemple, « les sources d’eau pure » (371 c), « les banquets bien ordonnés », sont des images très fréquentes dans les descriptions eschatologiques du ier siècle avant J.-Ch. ; l’expression χῶρος εὐσεβῶν pour désigner le séjour des bienheureux, ne date guère que de l’époque romaine ; la confusion des Érynnies et des Peines, avec attribution à ces dernières des torches brûlantes, instrument de leurs fonctions vengeresses, la légende du tonneau des Danaïdes… paraissent être autant d’indices d’une rédaction récente[2]. Ces différentes indications ne suffiraient pourtant pas, à elles seules, pour baser une certitude. Nous sommes très pauvres en textes anciens concernant les légendes orphico-pythagoriciennes. Il reste possible que des documents aujourd’hui perdus nous permettraient de rétablir la chaîne entre les témoins d’un âge plus jeune et ceux des temps les plus reculés. Nous pouvons, du moins, conclure que le mythe ne contredit pas nos hypothèses précédentes, et même plutôt les confirme.

  1. A. Döring, Die eschatologischen Mythen Platons, in Arch. f. Gesch. der Philos., VI, 1893, p. 475 et suiv.
  2. M. Chevalier a longuement critiqué chacun de ces traits. Nous ne pouvons que renvoyer à son ouvrage, spécialement p. 92-100.