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DE LA VERTU

pour examiner si ce sont ceux-là qui rendent les hommes bons ?

Thucydide[1], Thémistocle, Aristide, Périclès.

dEh bien ! pouvons-nous dire qui fut le maître des uns ou des autres ?

Nous ne le pouvons : on ne dit point son nom.

Mais quoi, quelqu’un de leurs disciples alors, étranger ou concitoyen, ou quelque autre, libre ou esclave, qui grâce à leur société, soit devenu sage et bon[2] ?

On n’en cite aucun, non plus.

Serait-ce donc que l’envie les empêchait de communiquer la vertu aux autres ?

Peut-être.

Pour ne pas avoir de rivaux, comme les cuisiniers, les médecins, les charpentiers[3] ? Cela, en effet, leur porte tort à eux, d’avoir de nombreux rivaux et de vivre avec beaucoup de gens semblables à eux. Est-ce le cas des hommes de bien, cela leur porte-t-il tort de vivre au milieu de leurs semblables ?

C’est possible.

Les hommes de bien, ne sont-ils pas en même temps justes ?

Oui.

Y a-t-il quelqu’un à qui il soit avantageux de vivre non parmi les hommes de bien, mais parmi les mauvais ?

Je ne sais que répondre.

Ne peux-tu non plus répondre à ceci : est-ce le propre des gens de bien de nuire et celui des mauvais d’être utiles, ou bien est-ce le contraire ?

Le contraire.

377Donc les gens de bien sont utiles et les mauvais nuisibles ?

Oui.

  1. Il ne s’agit pas de l’historien, mais de l’homme politique, rival de Périclès. Cf. Lachès, 179 a, Ménon, 94 c et Théagès, 130 a.
  2. Cf. Alcibiade I, 119 a : Ἀλλὰ τῶν ἄλλων Ἀθηναίων ἢ τῶν ξένων δοῦλον ἢ ἐλεύθερον εἰπὲ ὅστις αἰτίαν ἔχει διὰ τὴν Περικλέους συνουσίαν σοφώτερος γεγονέναι…
  3. Peut-être l’auteur du dialogue fait-il allusion aux vers d’Hésiode :

    Καὶ κεραμεὺς κεραμεῖ κοτέει καὶ τέκτονι τέκτων
    καὶ πτωχὸς πτωχῷ φθονέει καὶ ἀοιδὸς ἀοιδῷ.

    (Op. et dies, 25).