Page:Platon - Protagoras ; Euthydème ; Gorgias ; Ménexène, Ménon, Cratyle (trad. Chambry), 1992.djvu/205

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grande dans la cité. » Si, voyant que tu ne me crois pas, je te montrais mon poignard, tu me dirais peut‑être alors : « A ce compte, Socrate, tout le monde pourrait être puissant, puisqu’on pourrait de la même façon, incendier la maison qu’on voudrait, les arsenaux et les trières des Athéniens et tous les bateaux marchands de l’État et des particuliers. » Mais alors ce n’est pas avoir un grand pouvoir que de faire ce qui vous plaît. Que t’en semble ?

POLOS

Dans ces conditions‑là, certainement non.

SOCRATE

Peux‑tu me dire ce que tu reproches à un semblable pouvoir ?

POLOS

Oui.

SOCRATE

Qu’est‑ce donc ? Parle.

POLOS

C’est que nécessairement, si l’on agit ainsi, on sera puni.

SOCRATE

Etre puni, n’est‑ce pas un mal ?

POLOS

Il est certain que si.

SOCRATE

Donc, étonnant jeune homme, tu en reviens à juger qu’on a un grand pouvoir, lorsque, faisant son caprice, on y trouve son avantage et que cela est un bien. Voilà, semble‑t‑il, ce qu’est un grand pouvoir : hors de là, il n’y a que mal et faiblesse. Mais examinons encore ceci : ne reconnaissons‑nous pas qu’il vaut mieux parfois faire ce que nous venons de dire, tuer, bannir, dépouiller les gens, et parfois n’en rien faire ?

POLOS

Certainement.

SOCRATE

Sur ce point‑là, semble‑t‑il, nous sommes d’accord, toi et moi ?

POLOS

Oui.

SOCRATE

Dans quel cas, selon toi, vaut‑il mieux commettre ces actes ? Dis‑moi comment tu en fais la démarcation.

POLOS

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