Page:Platon - Protagoras ; Euthydème ; Gorgias ; Ménexène, Ménon, Cratyle (trad. Chambry), 1992.djvu/206

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70e Non, Socrate ; réponds toi-même à ta question.

SOCRATE

Eh bien, Polos, puisque tu préfères m’écouter, je dis que cela vaut mieux, quand on fait un de ces actes avec justice, et que c’est mauvais, si l’acte est injuste.

POLOS

XXVI. — Belle difficulté vraiment, Socrate, de te réfu­ter ! Un enfant même te prouverait que tu es dans l’erreur.

SOCRATE

J’aurais beaucoup de reconnaissance à cet enfant, et j’en aurai autant pour toi, si tu me réfutes et me débarrasses de ma niaiserie. Ne te lasse donc pas d’obliger un homme qui t’aime, et réfute‑moi.

POLOS

Pour te réfuter, Socrate, on n’a nul besoin de prendre des exemples dans le passé : ceux d’hier et d’aujourd’hui suffisent pour te convaincre d’erreur et te démontrer que les gens injustes sont souvent heureux.

SOCRATE

De quels exemples parles‑tu ?

POLOS

Tu vois bien sans doute Archélaos 18, fils de Perdiccas, régner aujourd’hui en Macédoine ?

SOCRATE

Si je ne le vois pas, j’en ai du moins entendu parler.

POLOS

Eh bien, te paraît‑il heureux ou malheureux ?

SOCRATE

Je n’en sais rien, Polos : je ne me suis pas encore rencontré avec lui.

POLOS

Quoi donc ? tu le saurais, si tu t’étais rencontré avec lui, et, d’ici même, tu ne peux pas savoir autrement qu’il est heureux ?

SOCRATE

Non, par Zeus, non.

POLOS

Alors on peut être sûr, Socrate, que, du grand roi lui-­même, tu vas dire que tu ignores s’il est heureux.

SOCRATE

470e-471d