'489e-490c Non, Calliclès, j’en jure par Zéthos, dont tu t’es servi amplement tout à l’heure pour me railler. Allons, dis‑moi quels sont ceux que tu appelles les meilleurs.
Ceux qui valent mieux.
Ne vois‑tu donc pas que, toi aussi, tu te bornes à des mots et que tu n’expliques rien ? Veux‑tu me dire si par les meilleurs et les plus puissants tu entends les plus sages ou d’autres ?
Oui, par Zeus, ce sont ceux‑là que j’entends, sans aucun doute.
Il arrive donc souvent, d’après toi, qu’un seul homme sage soit plus puissant que des milliers d’hommes déraisonnables. C’est à lui qu’il appartient de commander, aux autres d’obéir et celui qui commande doit avoir plus que ceux qui sont commandés. Voilà, ce me semble, ce que tu veux dire — et je ne fais pas la chasse à tel ou tel mot — s’il est vrai qu’un seul soit plus puissant que des milliers.
Oui, c’est cela que je veux dire. Pour moi, le droit selon la nature, c’est que le meilleur et le plus sage commande aux médiocres et qu’il ait une plus grosse part.
XLV. — Arrête un peu. Que peux‑tu bien dire encore à ceci ? Suppose que nous soyons, comme à présent, beaucoup d’hommes assemblés au même endroit et que nous disposions en commun d’une abondante provision de nourriture et de boisson, que notre assemblée soit composée de toute sorte de gens, les uns forts, les autres faibles, et que l’un d’entre nous, en qualité de médecin, s’entende mieux que les autres en ces matières, tout en étant, comme il est vraisemblable, plus fort que les uns, plus faible que les autres, n’est‑il pas vrai que ce médecin, étant plus savant que nous, sera meilleur et plus puissant dans cette circonstance ?
Assurément.
Cela étant, devra‑t‑il, parce qu’il est meilleur, prendre de ces vivres une plus large part que nous, ou bien, par le fait qu’il commande, n’est‑ce pas à lui de faire la 490c-490e