Page:Platon - Théétète. Parménide, trad. Chambry.djvu/93

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SOCRATE

Alors vous pensez, ce me semble, toi et Théodore, qu’il faut examiner la question d’une autre façon.

THÉÉTÈTE

Oui, certainement, d’une autre façon.

SOCRATE

Alors procédons comme je vais dire pour voir si la science et la sensation sont la même chose ou si elles sont différentes. C’est à quoi tendait en définitive toute notre dispute, et c’est dans cette vue que nous avons remué toutes ces idées étranges. N’est-ce pas vrai ?

THÉÉTÈTE

Tout à fait vrai.

SOCRATE

Accorderons-nous donc que tout ce que nous sentons par la vue ou par l’ouïe, nous le savons du même coup ? Par exemple, avant d’avoir appris la langue des barbares, dirons-nous que, lorsqu’ils parlent, nous ne les entendons pas, ou que, du même coup, nous les entendons et savons ce qu’ils disent ? Pareillement, si, ne sachant pas lire, nous jetons les yeux sur des lettres, soutiendrons-nous que nous ne les voyons pas, ou que nous les comprenons en les voyant ?

THÉÉTÈTE

Nous dirons, Socrate, que nous savons juste ce que nous voyons et entendons ; dans le cas des lettres, que nous voyons à la fois et connaissons leur forme et leur couleur, et, dans le cas de la langue, que nous entendons à la fois et connaissons les sons aigus et les graves, mais ce qu’enseignent à ce sujet les grammairiens et les interprètes, ni nous ne le percevons par la vue et l’ouïe, ni nous ne le connaissons.

SOCRATE

Parfaitement répondu, Théétète, et il serait mal à propos de te chicaner là-dessus, car il faut que tu prennes de l’assurance.

XVIII. — Mais fais attention à une nouvelle difficulté qui s’avance, et vois comment nous la repousserons.

THÉÉTÈTE

Quelle est donc cette difficulté ?

SOCRATE