tout en notre pouvoir, eux, leur ville, leurs enfants, leurs biens et leurs dieux. Ensuite on donna à mon maître. Amphitryon, comme un hommage offert à sa valeur, une coupe d’or dans laquelle le roi Ptérélas avait coutume de boire. Voilà le récit que je ferai à ma maîtresse. A présent, continuons à remplir les ordres démon maître, et entrons dans lâ maison.
Merc. Oh ! oh ! je crois qu’il se dispose à entrer ; je vais au-devant de lui, et je réponds qu’il n’approchera pas de cette maison aujourd’hui ; à la faveur de sa ressemblance, je veux me moquer un peu de lui… Oh çà, puisque j’ai pris sa figure et son maintien, il faut aussi que je prenne ses mœurs et ses manières. Il faut donc que je sois un vaurien, un fourbe, un juré fripon, et que je le batte avec ses propres armes pour l’éloigner de la maison. Mais qu’est-ce ? Il regarde le ciel ; observons un peu ce qu’il va faire.
Sos. Ma foi, s’il y a quelque chose dont je croie être certain, c’est que Vesper a trop bu cette nuit, et qu’il dort pour cuver son vin. Les étoiles de l’Ourse ne bougent pas de place dans le ciel ; la lune en est précisément au même point que lorsqu’elle s’est levée ; ni l’Orion, ni Vénus, ni les pléiades, ne descendent sur l’horizon ; toutes les étoiles restent à leur poste, et la Nuit paraît bien décidée à ne pas céder la place au Jour.
Merc. Fort bien, complaisante Nuit : continue d’obéir aux désirs de mon père. Tu rends un bon service au meilleur des dieux… Tu ne perdras pas ta peine.
Sos. Je ne crois pas avoir vu une nuit aussi longue que celle-ci, excepté pourtant cette autre où, suspendu sous les aisselles, je reçus les étrivières depuis le matin jusqu’au soir. Ma foi, cette nuit-ci me paraît encore plus longue. Je crois que le Soleil reste couché parce qu’il a trop bu. Je serais bien étonné s’il n’avait un peu plus soupe qu’à son ordinaire.
Merc. Coquin ! voilà donc comme tu parles des dieux ! Tu penses, apparemment, qu’ils te ressemblent ! Laisse moi faire, tes paroles auront leur récompense. Viens ici, tu te trouveras mal de la rencontre.
Sos. Où sont ces libertins qui veulent toujours coucher deux ? Voilà une nuit superbe à passer avec une fille ! Ils auront le temps de lui faire gagner son argent.
Merc. Mon père suit justement le conseil de ce maraud ; il est couché avec Alcmène, et il met les moments à profit.
Sos. Allons faire une commission, et donnera Alcmène des nouvelles de mon maître. Mais quel est cet homme que je vois devant notre porte à cette heure de la nuit ? Il a mauvaise mine.
Merc. On n’est pas plus poltron que ce faquin.
Sos. Que veut-il ? Il a bien l’air de croire qu’il y a quelque chose à refaire à mon manteau.
Merc. Il a peur ; je vais m’amuser à ses dépens.
Sos. Je suis perdu ; la mâchoire me démange ; cet homme-là va me recevoir à coups de poing. C’est par bonté sans doute ; et comme mon maître m’a forcé à veiller, il veut me faire dormir en m’assommant. Pour le coup, je suis mort ! quelle taille ! quelle vigueur !
Merc. Je vais parler haut, afin qu’il entende ce que je dirai. Je veux le faire trembler de plus en plus. Allons, mes poings ; il y a trop longtemps que vous vous reposez, et que vous ne fournissez point de provisions à mon estomac. À peine me souvient-il de votre dernier exploit ; c’est hier que vous avez assommé et dépouillé quatre hommes.
Sos. Je crains bien de changer de nom, et de