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Page:Plaute - Comédies, traduction Sommer, 1876, tome 1.djvu/108

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LE PARASITE. Que ne le faites-vous emporter au logis par vos servantes ?

ARTÉMONE. Patience ! je saurai lui rendre la vie dure.

LE PARASITE. Je n’en doute pas, tant que vous serez sa femme.

ARTÉMONE. Je me figure bonnement que le cher homme est occupé au sénat ou avec ses clients, et que s’il ronfle toute la nuit, c’est la suite de ses fatigues. Je le crois bien, il rentre le soir n’en pouvant plus, après le bel emploi de sa journée ; il va cultiver le champ d’autrui, et laisse le sien en friche ; il se dérange, et il faut encore qu’il dérange son fils.

LE PARASITE. Suivez-moi, vous allez le prendre en flagrant délit.

ARTÉMONE. C’est ce que je désire plus que tout.

LE PARASITE. Mais dites-moi.

ARTÉMONE. Qu’est-ce ?

LE PARASITE. Si vous voyez votre mari couché à table, la couronne sur la tête et la nymphe entre ses bras, êtes-vous sûre de le reconnaître ?

ARTÉMONE. Si j’en suis sûre !

LE PARASITE, entrouvrant la porte. Tenez, le voilà.

ARTÉMONE. Je succombe !

LE PARASITE. Attendez un peu, et sans nous montrer, observons ce qui se passe là dedans.

ARGTYRIPPE. Hé ! mon père, quand aurez-vous fait de l’embrasser ?

DÉMÉNÈTE. Je t’avoue, mon fils…

ARGYRIPPE. Quoi ?

DÉMÉNÈTE. Que je l’aime à la folie.

LE PARASITE, à Artémone. L’entendez-vous ?

ARTÉMONE. J’entends.

DÉMÉNÈTE, à Philénie. Et je ne déroberais pas à ma femme le manteau auquel elle tient le plus, pour te l’apporter ? Sur mon âme, je n’en démordrai pas, quand on m’offrirait de la voir mourir avant un an.

LE PARASITE, à Artémone. Vous croyez peut-être que c’est la première fois qu’il fréquente les maisons de débauche ?

ARTÉMONE. Le misérable me volait, tandis que je soupçonnais mes servantes et que je maltraitais les pauvres innocentes.

ARGYRIPPE. Mon père, faites-nous donner du vin ; il y a longtemps que j’ai bu le premier coup.

DÉMÉNÈTE. Esclave, commence par le haut bout ; et pendant qu’il verse, toi, la belle, qui es là au-dessous de moi, un baiser.