On vous rend la moitié de votre argent, acceptez, et buvez, insallez-vous près de la belle.
NICOBULE. Moi, que j’aille me mettre à boire dans une maison où mon fils se perd !
PHILOXÈNE. Eh donc, il faut bien boire.
NICOBULE. Allons, soit ; c’est bien honteux, mais je m’y résigne.... je tâcherai de prendre sur moi… Et il me faudra voir, de mes yeux, mon fils couché près de sa maîtresse ?
BACCHIS I. Non pas ; c’est vous qui serez près de moi, et je vous aimerai, je vous embrasserai.
NICOBULE. La tête me démange : ah ! que je suis malheureux ! à peine ai-je le courage de dire non.
BACCHIS I. Eh quoi ! ne pensez-vous pas au dicton : « Le bon temps dans la vie n’est pas de longue durée, et l’occasion perdue ne se retrouve pas chez les morts ? »
NICOBULE. Que faire ?
PHILOXÈNE. Vous le demandez encore ?
NICOBULE. Je voudrais, mais je crains.
BACCHIS I. Que craignez-vous ?
NICOBULE. De me mettre à la merci de mon fils et de mon esclave.
BACCHIS I. Eh ! mon petit cœur, est-ce que c’est possible ? C’est votre fils ; où voulez-vous qu’il prenne, si vous ne lui donnez rien ? Allons, accordez-moi leur grâce.
NICOBULE. Comme elle s’insinue ! vouloir obtenir ce que j’étais résolu à ne pas accorder ! me voilà perverti par vous et pour vous.
BACCHIS I, l’embrassant. Vous ne pourrez pas vous défaire de moi. Eh bien, n’est-ce pas chose convenue ?
NICOBULE. Je l’ai dit, je ne me dédirai pas.
BACCHIS I. Le jour baisse ; venez vous mettre à table. Vos fils vous attendent.
NICOBULE. Oui, ils attendent que nous mourions bien vite.
BACCHIS I. Voici la nuit, suivez-nous.
PHILOXÈNE. Menez-nous où vous voudrez, nous sommes vos esclaves.
BACCHIS I, aux spectateurs. Les voilà joliment pris, eux qui voulaient prendre leurs fils. (Aux vieillards.) Venez.