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Page:Plaute - Comédies, traduction Sommer, 1876, tome 1.djvu/242

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tune se garde bien de faire et ne fera jamais pour toi. Mais qui es-tu ?

HÉGION. Tournez-vous, je suis Hégion.

ERGASILE. O le meilleur de tous les hommes, que vous arrivez à propos !

HÉGION. Vous avez sans doute trouvé au port quelque amphitryon, et c’est pour cela que vous me dédaignez.

ERGASILE. Votre main.

HÉGION. Ma main ?

ERGASILE. Oui, votre main, et sur-le-champ.

HÉGION. La voilà.

ERGASILE. Réjouissez-vous.

HÉGION. Pourquoi me réjouir ?

ERGASILE. Parce que je le veux ; allons, réjouissez-vous donc.

HÉGION. Ah ! j’ai plutôt sujet de m’affliger que de me réjouir. ERGASILE. Ne vous fâchez pas ; j’aurai bientôt effacé jusqu’à la moindre trace de vos chagrins. Réjouissez-vous hardiment.

HÉGION. Eh bien donc, je me réjouis, sans savoir pourquoi.

ERGASILE. Vous faites bien. Donnez ordre…

HÉGION. Quel ordre ?

ERGASILE. Qu’on allume un grand feu.

HÉGION. Un grand feu ?

ERGASILE. Oui, vous dis-je, un grand feu.

HÉGION. Comment, vautour ! crois-tu que j’irai mettre pour toi le feu à ma maison ?

ERGASILE. Ne vous fâchez pas. Voulez-vous, ou non, commander qu’on mette la marmite ? qu’on nettoie les plats ? qu’on fasse cuire le lard et les viandes sur un ardent brasier ? que l’un s’en aille acheter du poisson ?

HÉGION. Il rêve tout éveillé.

ERGASILE. L’autre du porc, de l’agneau, des poulets ?

HÉGION. Vous vous y entendez, mais il faut de quoi.

ERGASILE. Jambon, lamproie, thon mariné, maquereau, raie, thon frais, fromage à la crème.

HÉGION. Il vous sera plus facile de nommer toutes ces choses-là que de les manger à ma table, Ergasile.

ERGASILE. Croyez-vous donc que je parle pour moi ?

HÉGION. Vous trouverez ici quelque chose à mettre sous la dent, mais pas beaucoup, ne vous y trompez pas ; ainsi n’apportez chez moi que votre appétit de tous les jours.

ERGASILE. Bon ! je ferai si bien que vous voudrez vous mettre en dépense, quand même je vous en empêcherais.