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Page:Plaute - Comédies, traduction Sommer, 1876, tome 1.djvu/31

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MERCURE. Si je le caressais tant soit peu, afin de rendormir ?

SOSIE, à part. Tu me rendrais service, après trois nuits blanches.

MERCURE. Malheur à moi ! cette main ne sait plus frapper une mâchoire. Un vrai coup de poing doit défigurer son homme.

SOSIE, à part. Le traître s’apprête à me donner figure nouvelle.

MERCURE. S’il est bien appliqué sur le mufle, pas un os ne doit rester en place.

SOSIE, à part. Il me désossera comme une lamproie. La peste. soit du désosseur d’hommes ! S’il m’aperçoit, je suis perdu.

MERCURE. Je sens quelqu’un ; gare à lui !

SOSIE, à part. Est-ce que par hasard je me serais fait sentir ?

MERCURE. Et quelqu’un qui ne doit pas être loin d’ici ; mais il a fait une fameuse traite[1] !

SOSIE, à part. C’est un sorcier.

MERCURE. Les poings me grillent.

SOSIE, à part. Si tu veux les exercer sur mon dos, commence, je te prie, par les amollir un peu contre la muraille !

MERCURE. Des paroles ont volé jusqu’à mon oreille.

SOSIE, à part. Ah ! malheureux ! mes paroles ont des ailes ; que ne les ai-je coupées !

MERCURE. Cet homme vient pour que je charge sa bête.

SOSIE, à part. Eh ! je n’ai point amené de bête avec moi.

MERCURE. Mes poings lui feront bonne mesure.

SOSIE, à part. La traversée m’a bien assez fatigué ; j’en ai encore mal au cœur. C’est tout ce que je puis faire que de marcher à vide ; comment veut-il que je m’en tire avec une charge ?

MERCURE. Décidément, j’entends parler je ne sais qui.

SOSIE, à part. Je suis sauvé, il ne me voit pas. Il dit qu’il entend parler je ne sais qui ; moi, je m’appelle Sosie.

MERCURE. C’est là, si je ne me trompe, sur la droite, qu’une voix vient frapper mon oreille.

SOSIE, à part. Si ma voix Ta frappé, je crains bien qu’il ne me frappe à son tour.

MERCURE, à part. Il s’avance vers moi, c’est à merveille.

  1. Plaisanterie peu délicate. Le sens a été très-contesté, mais nous paraît cependant fort clair. Mercure sent la sueur d’un homme qui a fait un long trajet.