Page:Plaute - Comédies, traduction Sommer, 1876, tome 1.djvu/342

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la même ligne : entremetteur et banquier font la paire. Eux au moins ils font leur trafic en cachette ; vous, c’est en pleine place. Vous assassinez par l’usure, eux par les mauvais conseils et !a débauche. Le peuple a rendu lois sur lois contre vous ; mais à peine rendues, vous passez à travers la toile, vous trouvez toujours bien quelque fente. Les lois sont pour vous de l’eau bouillante, mais qui finit par se refroidir.

LYCON. J’aurais mieux fait de me taire.

CAPPADOX. Euh ! comme vous nous arrangez, mauvais garçon !

CHARANÇON. Mal parler de ceux qui ne le méritent pas, c’est médisance ; mais dauber sur ceux qui le méritent, c’est bien dire : voilà mon avis. Je ne me soucie ni de votre garantie ni de celle d’un entremetteur quelconque. Lycon, avez-vous encore besoin de moi ?

LYCON. Bon voyage.

CHARANÇON. Adieu.

CAPPADOX, la rappelant. Hé ! hé ! écoutez donc.

CHARANÇON. Parle, que veux-tu ?

CAPPADOX. Traitez-la comme il faut, je vous prie, faites en sorte qu’elle se trouve bien. Je l’ai élevée chez moi en tout bien, tout honneur.

CHARANÇON. Eh ! si elle t’intéresse tant, ne donnes-tu rien pour qu’elle se trouve bien ?

CAPPADOX. Que la peste…

CHARANÇON. C’est tout justement ce qu’il te faut.

CAPPADOX, à Planésie. Pourquoi pleures-tu, sotte ? Ne crains rien, je t’ai ma foi vendue à un bon maître. Conduis-toi bien et suis-le ; va bellement, ma belle.

LYCON. La Rafle, je ne puis plus, vous être bon à rien ?

CHARANÇON. Adieu, et bonne santé, car vous avez mis gentiment à mon service votre peine et votre argent.

LYCON. Bien des compliments à votre patron.

CHARANÇON. Je n’y manquerai pas. (Il sort avec Planésie.)

LYCON. Est-ce tout, entremetteur ?

CAPPADOX. Eh ! ces dix mines, donnez-les-moi pour me soigner et me rétablir.

LYCON. Tu les auras ; fais-les prendre demain. (Il sort.)

CAPPADOX. Puisque j’ai fait une bonne affaire, je veux aller prier au temple. Dans le temps, j’ai acheté cette petite fille pour dix mines ; mais je n’ai jamais revu celui qui me l’a vendue. Il est mort sans doute. Qu’est-ce que cela me fait ? j’ai l’argent. Les dieux envoient de bonnes aubaines à leurs protégés.