LE VIEILLARD. Au nom des dieux et des hommes, je vous le dis, exécutez de point en point les ordres que je vous ai donnés et que je vous répète : enlevez-moi à l’instant cet homme et portez-le chez le médecin, à moins que vous ne fassiez bon marché de vos jambes et de vos côtes. S’il menace, qu’on s’en soucie comme de cela. Eh bien, vous restez plantés là ! vous hésitez ! il devrait déjà être en l’air. Je cours chez le médecin, vous m’y trouverez à votre arrivée.
MÉNECHME. C’est fait de moi ! Qu’est-ce à dire ? pourquoi ces gens-là fondent-ils sur moi ? Que voulez-vous ? que cherchez-vous ? pourquoi m’entourer ? Où m’entraine-t-on ? où m’emporte-t-on ? je suis perdu. Citoyens d’Épidamne, à l’aide, au secours ! Me lâcherez-vous ?
MESSÉNION. Dieux immortels, que vois-je ? Des gens qui enlèvent brutalement mon maître !
MÉNECHME. Personne n’a le courage de me secourir ?
MESSÉNION. Moi, mon maître, et de grand cœur. Quelle infamie, habitants d’Epidamne, d’enlever en pleine paix, en plein jour, en pleine rue, mon maître, un homme libre qui est venu chez vous ! lâchez-le.
MÉNECHME. Par pitié, qui que vous soyez, secourez-moi, ne souffrez pas qu’on me traite si outrageusement.
MESSÉNION. Oui je vous aiderai, je vous défendrai, je vous secourrai de toutes mes forces. Je ne souffrirai point qu’il vous arrive malheur : plutôt périr moi-même. De grâce, maître, arrachez l’œil à celui qui vous tient par l’épaule. Quant aux autres, je vais leur semer la mâchoire de coups de poing. Il vous en coûtera cher de l’enlever : lâchez-le.
MÉNECHME. J’en liens un par l’œil.
MESSÉNION. Arrachez, qu’il n’en reste que la place. Ah scélérats ! ah voleurs ! ah brigands !
LES ESCLAVES. Aïe, aïe ! grâce !
MESSÉNION. Lâchez-le.
MÉNECHME. De quel droit me touchez-vous ? (À Messénion.) Peignez-les à poings fermés.
MESSÉNION. Allons, décampez, allez vous faire pendre. Tiens encore, toi qui t’en vas le dernier, attrape. Je leur ai accommodé le museau à ma mode. Par Pollux, mon maître, je suis arrivé à temps pour vous assister.